Denis Gohin.Vers son site.
Gazette n°461
mercredi 8 mars 2023
sponsorisée par le mystère
“Les contes incongrus d’Épinac” est un recueil de contes au travers du temps, de Jules César à l’année 2063, en passant par le Masque de fer, Napoléon, Petit Breton et bien d’autres personnages de l’Histoire dans quelques mystères.
Il fut une époque où l’on pouvait lire dans la presse des histoires... des histoires en épisodes.
L’ÉPISODE
1888, fin novembre, il fait un frais de saison à Épinac.
Un homme inconnu de tous arrive à la gare d’Épinac, descendant du train avec un énorme bagage.
— Monsieur ? Je peux vous aider si vous le voulez, demande Émile Grolle.
Si Émile est un homme d’une trentaine d’années, assez fort de tour de taille, le poil noir hirsute ; l’autre, lui, est assez longiligne, glabre et portant beau.
— Thank you so much.
— Ah ? Vous êtes engliche ?
— Oui, jeu lé souis hone effect.
Émile sourit au français approximatif du nouvel arrivant.
— Vous voulez que je vous dépose quelque part ?
— À la commissariat.
— Non d’une pipe en bois !
Émile, surpris par la destination de l’individu, le transporte donc au commissariat d’Épinac, dans sa charrette.
L’homme donne sa pièce à Émile et se dirige vers l’accueil.
Ernest Lafosse, le planton, est en train de lire le journal “Le bien public” où il est question de ces “Bandes noires” qui depuis quelques années défraient la chronique. Il lève la tête.
— Vous désirez ?
— Voir vautreu quiommissair’.
— Ah ? C’est à quel sujet ?
— I beg you pardon, jeu meu praisente, je souis le siouper intondant MacFair, de Scotland Yard, et jeu doit absolutly voir viotre sioupairieur.
Nullement impressionné, Ernest se lève mollement.
— Suivez-moi.
Ils montent à l’étage, et le planton, ouvrant une grande porte, annonce le visiteur.
— M’sieur l’commissaire, y a un type engliche qui demande à vous voir, y dit qu’il est super quelque chose et qu’il est de la...
Ernest se retourne vers le personnage.
— ...de quelle branche vous êtes ?
— Scotland Yard, le police britannique.
Le fonctionnaire se lève... il a peu l’occasion de croiser un sujet de sa majesté.
— Ah ?... euuh, enchanté... Monsieur ?
— MacFair, James MacFair.
— Je peux m’retirer, m’sieur l’commissaire ?
— Oui, oui, Ernest, je m’en occupe.
Ernest toisant l’anglais, fait demi-tour.
Le commissaire, Félicien Marteau tend une main cordiale, souriant.
— Que puis-je ?
L’homme s’assied, il croise les jambes avec cette distinction toute britannique.
— Voilà, jeu siouppose quieu vious avai entendiou parlai des horribeul meurtres qui ont tiou lieu in London ?
— Ah oui ! Ce “Jack l’Éventreur” il y a quelques semaines. Horrible !
— Yes, certainly.
— Mais je ne comprends pas...
Le super intendant sourit à son tour.
— Voilà, nious avons discover quieu ce Jack the ripper s’étiai enfoui en France.
Le commissaire, qui était encore debout, ne peut s’empêcher de s’écrouler d’un coup sur sa chaise.
— Meeerde alors !
Gardant son flegme au franc-parler de son interlocuteur, il reprend.
— Et niou avons le preuve quihil habite dans viotre ville.
— Non d’un chien ! Et vous savez qui c’est ?
— Yes !
James MacFair se penche vers Félicien, comme pour lui délivrer un secret que nul autre ne doit entendre.
— Quionnaissez-viou un certain Jacques Leripeux ?
— Ben oui ! C’est not’nouveau curé !
Le super intendant plonge, silencieux, son regard dans celui du commissaire.
— Non ? Vous voulez dire que...
James secoue la tête sentencieusement.
***
À quelque temps de là, le commissaire, trois gendarmes et James MacFair, en silence, s’approchent de l’église Saint-Pierre d’Épinac, contournent une charrette.
— Tiens ? La charrette du père Émile, chuchote le commissaire, à l’adresse du super intendant.
Ils entrent enfin, à pas de loup, dans la pénombre du narthex. Ils s’avancent vers l’autel... leurs yeux qui s’habituant à l’atmosphère sépulcrale, devinent des formes sur l’autel.
Un corps à peine reconnaissable, coupé en morceaux, baignant dans une mare de sang, gît — ô suprême horreur — sur la pierre de célébration de l’eucharistie.
Un papier, roulé dans l’une des orbites, attire l’attention de Félicien.
Délicatement, la main tremblante, il retire le message du trou sanglant. Il déroule le billet de ses doigts frissonnants. Il lit...
“Suite au prochain épisode”
mercredi 8 mars 2023
sponsorisée par le mystère
“Les contes incongrus d’Épinac” est un recueil de contes au travers du temps, de Jules César à l’année 2063, en passant par le Masque de fer, Napoléon, Petit Breton et bien d’autres personnages de l’Histoire dans quelques mystères.
Il fut une époque où l’on pouvait lire dans la presse des histoires... des histoires en épisodes.
L’ÉPISODE
1888, fin novembre, il fait un frais de saison à Épinac.
Un homme inconnu de tous arrive à la gare d’Épinac, descendant du train avec un énorme bagage.
— Monsieur ? Je peux vous aider si vous le voulez, demande Émile Grolle.
Si Émile est un homme d’une trentaine d’années, assez fort de tour de taille, le poil noir hirsute ; l’autre, lui, est assez longiligne, glabre et portant beau.
— Thank you so much.
— Ah ? Vous êtes engliche ?
— Oui, jeu lé souis hone effect.
Émile sourit au français approximatif du nouvel arrivant.
— Vous voulez que je vous dépose quelque part ?
— À la commissariat.
— Non d’une pipe en bois !
Émile, surpris par la destination de l’individu, le transporte donc au commissariat d’Épinac, dans sa charrette.
L’homme donne sa pièce à Émile et se dirige vers l’accueil.
Ernest Lafosse, le planton, est en train de lire le journal “Le bien public” où il est question de ces “Bandes noires” qui depuis quelques années défraient la chronique. Il lève la tête.
— Vous désirez ?
— Voir vautreu quiommissair’.
— Ah ? C’est à quel sujet ?
— I beg you pardon, jeu meu praisente, je souis le siouper intondant MacFair, de Scotland Yard, et jeu doit absolutly voir viotre sioupairieur.
Nullement impressionné, Ernest se lève mollement.
— Suivez-moi.
Ils montent à l’étage, et le planton, ouvrant une grande porte, annonce le visiteur.
— M’sieur l’commissaire, y a un type engliche qui demande à vous voir, y dit qu’il est super quelque chose et qu’il est de la...
Ernest se retourne vers le personnage.
— ...de quelle branche vous êtes ?
— Scotland Yard, le police britannique.
Le fonctionnaire se lève... il a peu l’occasion de croiser un sujet de sa majesté.
— Ah ?... euuh, enchanté... Monsieur ?
— MacFair, James MacFair.
— Je peux m’retirer, m’sieur l’commissaire ?
— Oui, oui, Ernest, je m’en occupe.
Ernest toisant l’anglais, fait demi-tour.
Le commissaire, Félicien Marteau tend une main cordiale, souriant.
— Que puis-je ?
L’homme s’assied, il croise les jambes avec cette distinction toute britannique.
— Voilà, jeu siouppose quieu vious avai entendiou parlai des horribeul meurtres qui ont tiou lieu in London ?
— Ah oui ! Ce “Jack l’Éventreur” il y a quelques semaines. Horrible !
— Yes, certainly.
— Mais je ne comprends pas...
Le super intendant sourit à son tour.
— Voilà, nious avons discover quieu ce Jack the ripper s’étiai enfoui en France.
Le commissaire, qui était encore debout, ne peut s’empêcher de s’écrouler d’un coup sur sa chaise.
— Meeerde alors !
Gardant son flegme au franc-parler de son interlocuteur, il reprend.
— Et niou avons le preuve quihil habite dans viotre ville.
— Non d’un chien ! Et vous savez qui c’est ?
— Yes !
James MacFair se penche vers Félicien, comme pour lui délivrer un secret que nul autre ne doit entendre.
— Quionnaissez-viou un certain Jacques Leripeux ?
— Ben oui ! C’est not’nouveau curé !
Le super intendant plonge, silencieux, son regard dans celui du commissaire.
— Non ? Vous voulez dire que...
James secoue la tête sentencieusement.
***
À quelque temps de là, le commissaire, trois gendarmes et James MacFair, en silence, s’approchent de l’église Saint-Pierre d’Épinac, contournent une charrette.
— Tiens ? La charrette du père Émile, chuchote le commissaire, à l’adresse du super intendant.
Ils entrent enfin, à pas de loup, dans la pénombre du narthex. Ils s’avancent vers l’autel... leurs yeux qui s’habituant à l’atmosphère sépulcrale, devinent des formes sur l’autel.
Un corps à peine reconnaissable, coupé en morceaux, baignant dans une mare de sang, gît — ô suprême horreur — sur la pierre de célébration de l’eucharistie.
Un papier, roulé dans l’une des orbites, attire l’attention de Félicien.
Délicatement, la main tremblante, il retire le message du trou sanglant. Il déroule le billet de ses doigts frissonnants. Il lit...
“Suite au prochain épisode”
Gazette n°450
vendredi 10 février 2023
sponsorisée par le froid
“À bas le travail, vive les travailleurs”, petit ouvrage reprenant l’article sur le sujet, dans “L’encyclopédie anarchiste”, parue entre 1925 et 1934.
Travailler ou pas... voilà la question.
UNE NUIT MASSACRÉE
La nuit était profonde, le froid déjà me saisissait. Ma chambre était emplie de ce silence nocturnal. Je n’arrivais pas à dormir, je ne sais pas pourquoi. Ce n’est pas “Massacre à la pince à épiler”, un navet gore, qui en était la cause... ça m’avait même assez amusé.
Non, je repensais à mes jeunes années, à ma mort prochaine dont j’étais plus proche que jamais. Cinquante-neuf ans, ça laisse des traces, des regrets, des sourires, des frissons. Tous ces petits faits qui reviennent en images furtives.
Je tournais en rond. Soudainement...
“Merde ! J’ai oublié de corriger le livre de Ludwig van Biteauvent”, pensai-je subitement.
C’est l’un de mes derniers auteurs, et son ouvrage “Étude sur la flagellation en milieu rural et plus précisément en Bourgogne durant les mois de Covid et après”, m’avait bien fait rire.
Je regardai donc l’heure. Il était trois heures un quart du matin.
“Est-ce que j’essaye de dormir, ou vais-je travailler ?” me posai-je la question.
Je relevai ma couette un peu... “Putain, qu’est-ce qu’il fait froid”, me rendis-je compte.
Je décidai de... ne rien décider. “C’est pas raisonnable de bosser à cette heure-ci”, me persuadai-je.
Mes pensées faisaient leur farandole. Ça ne m’aidait pas à me rendormir.
Je me levai d’un coup.
Je me recouchai immédiatement.
“Putain de froid !”
“Oui, mais j’ai envie de taffer sur cet ouvrage moi.”
Ça titillait mon cervelet.
Je regardai de nouveau l’heure. Trois heures trois quart.
“Et si je me regardais un film, histoire de me rendormir ?” me tâtai-je... “Il me reste le film, Massacre à la pince à ongles... 2, le retour de la vengeance”, projetai-je.
J’allumai l’écran et “lançai” le film. C’était bien la peine, en effet, il y avait une scène dès le début, où le fameux psychopathe fouettait sa victime avec une brosse à dents.
“Il est complétement stupide ce film-là”, estimai-je.
J’éteignis l’écran.
“Il faudrait une suite à Étude sur la flagellation en milieu rural et plus précisément en Bourgogne durant les mois de Covid et après”, imaginai-je. “Oui... mais laquelle ?... Étude sur la flagellation à Kiev durant l’opération spéciale en période de grand froid ?”... “Alors ? Si j’allais bûcher le sujet ? Il est quelle heure ?” Je regardai alors. Il était quatre heures vingt-cinq et il faisait de plus en plus froid.
“Oui, mais si je me lève, je vais avoir froid”, constatai-je. “Si je me regardais le troisième épisode... Massacre à la brosse à cheveux ?”
J’étais perplexe et le dilemme entre le froid, le travail et le dénouement de cette série... “Il y a pire que série Z ?” me questionnai-je.
Je regardai encore une fois l’heure. Il était juste cinq minutes plus tard que précédemment.
Je me suis retournée de l’autre côté, me blottissant entre ce coussin moelleux et ma couette.
“Le titre du livre de Ludwig... il est tout de même un peu long”, me consultai-je, “ça manque d’illustrations, c’est plutôt dommage...” m’avisai-je.
Je me retournai une nouvelle de l’autre côté l’esprit vide et le sourire en coin en imaginant quelles photos on pourrait faire.
Je me suis réveillée.
Il faisait jour.
J’ai regardé l’heure.
“Putain ! Onze heures vingt !”
Il faisait froid, encore plus froid.
Je me suis retournée une nouvelle fois.
“Je reste au lit, je travaillerais demain”, conclus-je.
J’ai alors allumé l’écran et j’ai regardé le dernier épisode :
“Massacre au cure-dent, le retour du dentiste”.
Épinac, le 10 février 2023
Gazette n°436
lundi 9 janvier 2023
sponsorisée par un chat blanc
“Chats d’auteurs” est un fameux recueil de nouvelles, dont Edgard Allan-Poe, Théophile Gautier, Émile Zola, Guy de Maupassant, Pierre Loti, Guillaume Apollinaire, Joachim Du Bellay, Arthur Conan Doyle et tant d’autres.
Tous y racontent une histoire... de chat.
LA NUIT DU CHASSEUR
Il faisait beau ce jour-là, dans la lande, le soleil réchauffait encore, malgré le crépuscule, les hautes herbes flottant au vent de la mer.
On entendait seulement les piaillements surnaturels des engoulevents, tapage presque assourdissant qui déchirait le silence paisible avec leurs “Pi-Pi-Pi” continus et lancinants, si différent de leurs frères d’Europe.
En cette fin de journée, alors que la lune, encore ronde, éclairait la plaine de sa lueur lugubre, se préparait ici la migration de ses oiseaux nocturnes.
Mais, le plus étrange en ce moment si particulier, étaient ces ombres tapies dans les broussailles. Leur queue se balançant nerveusement au rythme du vacarme, une horde de chats épiait la colonie de volatiles.
On dit que le chat est solitaire, mais ceux-là avaient retrouvé leur instinct de chasseur carnassier et dévastateur. Ils avaient faim.
Leurs yeux jaunes, fixaient d’un désir meurtrier ces proies tant appréciables à leur envie de viande.
L’un d’eux, blanc immaculé, portant une tache rousse sur le haut du crâne, semblait être le mâle alpha. Ce dernier tournait la tête d’un côté l’autre, comme pour vérifier la bonne tenue des troupes et faire respecter un silence total.
Alors que la nuit était tombée sur cette campagne... Le chat blanc à la tache rousse, entamait sa reptation feutrée. Il avait, presque couché, son ventre sur le sol, avançant, pas après pas, dans un calme parfait.
De droite et de gauche, les autres félins suivaient son exemple. La bande approchait furtivement, toujours les yeux fixés sur ses victimes, comme si chacun eut choisi sa pâture dans une concertation muette et mystique.
L’impensable, pour ce groupe affamé, se produisit.
Un orage invisible dans cette obscurité, éclata d’un coup. Un éclair aveuglant se refléta dans les pupilles funestes, mais découvrit leur position à la stupeur des engoulevents.
D’un bond gigantesque, le chat blanc à la tache rousse voulut se jeter sur le plus proche gibier. Mais ce dernier fut plus prompt et échappa alors aux crocs du chasseur.
De la cohorte dépitée, des grognements sourds exprimaient la contrariété, alors qu’un nuage d’ailes et de becs se mettait à tourner et retourner frénétiquement au-dessus de leurs têtes, sorte de sarabande exaspérée.
La pluie, hallebarde d’eau, s’abattit en un instant sur la scène de ce qui devait être alors un massacre.
La nuée mouvante des engoulevents, remis de sa stupeur, était partie.
Le clan du chat blanc à la tache rousse, se sépara dans un silence morose, juste interrompu de quelques grincements de dents avides.
L’orage redoubla de force et d’éclairs, l’eau s’infiltra partout, jusque dans le cœur fâché du chat blanc à la tache rousse.
Épinac, le 9 janvier 2023
lundi 9 janvier 2023
sponsorisée par un chat blanc
“Chats d’auteurs” est un fameux recueil de nouvelles, dont Edgard Allan-Poe, Théophile Gautier, Émile Zola, Guy de Maupassant, Pierre Loti, Guillaume Apollinaire, Joachim Du Bellay, Arthur Conan Doyle et tant d’autres.
Tous y racontent une histoire... de chat.
LA NUIT DU CHASSEUR
Il faisait beau ce jour-là, dans la lande, le soleil réchauffait encore, malgré le crépuscule, les hautes herbes flottant au vent de la mer.
On entendait seulement les piaillements surnaturels des engoulevents, tapage presque assourdissant qui déchirait le silence paisible avec leurs “Pi-Pi-Pi” continus et lancinants, si différent de leurs frères d’Europe.
En cette fin de journée, alors que la lune, encore ronde, éclairait la plaine de sa lueur lugubre, se préparait ici la migration de ses oiseaux nocturnes.
Mais, le plus étrange en ce moment si particulier, étaient ces ombres tapies dans les broussailles. Leur queue se balançant nerveusement au rythme du vacarme, une horde de chats épiait la colonie de volatiles.
On dit que le chat est solitaire, mais ceux-là avaient retrouvé leur instinct de chasseur carnassier et dévastateur. Ils avaient faim.
Leurs yeux jaunes, fixaient d’un désir meurtrier ces proies tant appréciables à leur envie de viande.
L’un d’eux, blanc immaculé, portant une tache rousse sur le haut du crâne, semblait être le mâle alpha. Ce dernier tournait la tête d’un côté l’autre, comme pour vérifier la bonne tenue des troupes et faire respecter un silence total.
Alors que la nuit était tombée sur cette campagne... Le chat blanc à la tache rousse, entamait sa reptation feutrée. Il avait, presque couché, son ventre sur le sol, avançant, pas après pas, dans un calme parfait.
De droite et de gauche, les autres félins suivaient son exemple. La bande approchait furtivement, toujours les yeux fixés sur ses victimes, comme si chacun eut choisi sa pâture dans une concertation muette et mystique.
L’impensable, pour ce groupe affamé, se produisit.
Un orage invisible dans cette obscurité, éclata d’un coup. Un éclair aveuglant se refléta dans les pupilles funestes, mais découvrit leur position à la stupeur des engoulevents.
D’un bond gigantesque, le chat blanc à la tache rousse voulut se jeter sur le plus proche gibier. Mais ce dernier fut plus prompt et échappa alors aux crocs du chasseur.
De la cohorte dépitée, des grognements sourds exprimaient la contrariété, alors qu’un nuage d’ailes et de becs se mettait à tourner et retourner frénétiquement au-dessus de leurs têtes, sorte de sarabande exaspérée.
La pluie, hallebarde d’eau, s’abattit en un instant sur la scène de ce qui devait être alors un massacre.
La nuée mouvante des engoulevents, remis de sa stupeur, était partie.
Le clan du chat blanc à la tache rousse, se sépara dans un silence morose, juste interrompu de quelques grincements de dents avides.
L’orage redoubla de force et d’éclairs, l’eau s’infiltra partout, jusque dans le cœur fâché du chat blanc à la tache rousse.
Épinac, le 9 janvier 2023
Un grand crime
Pour une fois que j’étais habillée en garçon dans ma boutique, j’ai eu une surprise.
C’était en décembre 2029, j’étais en train de travailler à la prochaine édition du dernier roman de Boris Vian, “L’arrache cœur”, puisqu’enfin, l’auteur était dans le “domaine public”.
Je prenais un plaisir quasi gustatif à préparer cette édition et mon sourire devait exprimer cette jouissance intellec-tuelle.
Un homme était à l’huis de ma librairie, il était bien mis, et son regard semblait bienveillant. Dès qu’il vit mon sourire, son visage s’éclaira.
Il entra dans la librairie en refermant la porte derrière lui... il faisait si froid !
— Bonjour madame, me fit-il.
Depuis mon opération, il y a deux ans, à Lyon, je n’étais toujours pas habituée à ce qu’on me donnât du “madame”.
Ça m’a fait quand même encore bizarre... je ne m’y attendais pas.
J’ai souri.
— Bonjour monsieur.
Je me suis levée.
C’est là où son regard s’est embrumé. Il a regardé mon pantalon en velours côtelé et ma chemise à carreaux sous un léger pull noir ouvert.
— Vous n’aimez pas ? ai-je demandé un peu inquiète.
— Une femme... en pantalon ?
Sa réflexion m’a presque attristée, surtout que c’était la première fois depuis longtemps que je ne m’étais pas habillée en garçon.
— Oui, je suis désolée, mais j’ai un peu froid en ce moment et je me suis permise de mettre un pantalon.
Son regard se durcit, et je vis bien qu’il allait me passer un savon, après tout je contrevenais aux usages législatifs en cours.
— N’empêche, c’est illégal ![1]
J’étais gênée, comment allais-je m’en sortir ?
— Voudriez-vous me donner le temps de me changer ?
Il me regarda, et son sourire réapparu.
— Si cela me plaît, je veux bien oublier ce que j’ai vu.
Je montai prestement dans ma chambre, et je revins accoutrée comme la loi m’y oblige.
Quand il me vit de nouveau, avec ma jupe noire aux genoux d’où mes bas sortaient comme de longues lignes noires, il s’approcha de moi d’un pas décidé, la main prête à me soulever le léger tissu de ma croupe.
Je me suis reculée et je lui ai mis un grand coup de pied entre les cuisses. Et le doigt levé, doctement, je lui ai dit :
— La loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel fixe désormais une nouvelle définition du harcèlement sexuel dans le code pénal.
Naaaamais !
Épinac, le 16 décembre 2022
[1] On notera que si c’est ici une fiction, les femmes, en effet, avaient l’interdiction de porter un pantalon par “l’Ordonnance concernant le travestissement des femmes” du 17 novembre 1800, abrogée en 1892 et 1909 autorisant le port féminin du pantalon “si la femme tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d'un cheval”. Cette ordonnance n’a été officiellement, totalement abrogée que le... 31 janvier 2013 !
Pour une fois que j’étais habillée en garçon dans ma boutique, j’ai eu une surprise.
C’était en décembre 2029, j’étais en train de travailler à la prochaine édition du dernier roman de Boris Vian, “L’arrache cœur”, puisqu’enfin, l’auteur était dans le “domaine public”.
Je prenais un plaisir quasi gustatif à préparer cette édition et mon sourire devait exprimer cette jouissance intellec-tuelle.
Un homme était à l’huis de ma librairie, il était bien mis, et son regard semblait bienveillant. Dès qu’il vit mon sourire, son visage s’éclaira.
Il entra dans la librairie en refermant la porte derrière lui... il faisait si froid !
— Bonjour madame, me fit-il.
Depuis mon opération, il y a deux ans, à Lyon, je n’étais toujours pas habituée à ce qu’on me donnât du “madame”.
Ça m’a fait quand même encore bizarre... je ne m’y attendais pas.
J’ai souri.
— Bonjour monsieur.
Je me suis levée.
C’est là où son regard s’est embrumé. Il a regardé mon pantalon en velours côtelé et ma chemise à carreaux sous un léger pull noir ouvert.
— Vous n’aimez pas ? ai-je demandé un peu inquiète.
— Une femme... en pantalon ?
Sa réflexion m’a presque attristée, surtout que c’était la première fois depuis longtemps que je ne m’étais pas habillée en garçon.
— Oui, je suis désolée, mais j’ai un peu froid en ce moment et je me suis permise de mettre un pantalon.
Son regard se durcit, et je vis bien qu’il allait me passer un savon, après tout je contrevenais aux usages législatifs en cours.
— N’empêche, c’est illégal ![1]
J’étais gênée, comment allais-je m’en sortir ?
— Voudriez-vous me donner le temps de me changer ?
Il me regarda, et son sourire réapparu.
— Si cela me plaît, je veux bien oublier ce que j’ai vu.
Je montai prestement dans ma chambre, et je revins accoutrée comme la loi m’y oblige.
Quand il me vit de nouveau, avec ma jupe noire aux genoux d’où mes bas sortaient comme de longues lignes noires, il s’approcha de moi d’un pas décidé, la main prête à me soulever le léger tissu de ma croupe.
Je me suis reculée et je lui ai mis un grand coup de pied entre les cuisses. Et le doigt levé, doctement, je lui ai dit :
— La loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel fixe désormais une nouvelle définition du harcèlement sexuel dans le code pénal.
Naaaamais !
Épinac, le 16 décembre 2022
[1] On notera que si c’est ici une fiction, les femmes, en effet, avaient l’interdiction de porter un pantalon par “l’Ordonnance concernant le travestissement des femmes” du 17 novembre 1800, abrogée en 1892 et 1909 autorisant le port féminin du pantalon “si la femme tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d'un cheval”. Cette ordonnance n’a été officiellement, totalement abrogée que le... 31 janvier 2013 !
Le copain Gérard.
Le copain Denis:
Gazette n°413
mercredi 16 novembre 2022
sponsorisée par le cheval
“Les voyages de Gulliver” est un des romans d’aventure les plus célèbres. Ces aventures se finissent chez ce peuple de chevaux que sont les Houyhnhnms.
Mais si c’était l’inverse... qu’un cheval soit venu d’un pays lointain, pour nous visiter ?
AVOIR OU NE PAS AVOIR
L’autre jour, alors que je prenais mon café sur ma terrasse, en train de lire mon Canard enchaîné, un cheval s’est approché, l’air de rien.
J’ai posé l’hebdomadaire satirique et, je ne sais pourquoi... je lui ai parlé !
— Bonjour cheval, alors ? Tu es perdu ?
Imaginez ma surprise quand celui-ci me répondit :
— Je ne suis pas perdu, humain, et je ne m’appelle pas “Cheval”, mon prénom est “Georges”.
J’ai failli tomber de mon fauteuil. Je l’ai regardé, fixement, comme une poule devant un grille-pain, et j’ai balbutié.
— Co... comm... comment ça donc ? Vous parlez ?
— T’es pas sourd, humain... bien sûr que je parle. Qu’y a-t-il d’étrange à ça ?
— Ben... généralement, évidemment c’est une généralité... (j’avais l’air stupide de vouloir ne pas l’offusquer) les chevaux ne parlent pas.
— Première nouvelle, humain. Mais bon, passons sur l’incongruité du propos, me servirais-tu, puisqu’après tout c’est ici un estaminet... un jus de pomme ?
Là, je me suis pincé.
Non, je ne rêvai pas. Le canasson me commanda un jus de fruit.
J’ai repris mes habitudes de cafetier souriant et serviable.
— Je suis désolé, mais justement, je n’ai plus de jus de pomme pour le moment, il faut que j’aille en acheter.
— Okay, okay, un jus de prunes alors ?
Je me disais de plus en plus que c’était là une carne, et qu’il me faudrait de la patience pour qu’il soit satisfait de mon petit commerce.
— Je suis réellement navré, mais je n’ai pas de jus de prune, Georges.
Le cheval fit une moue désappointée.
— Un jus de banane ? De goyave ? De litchi ?
J’étais de plus en plus désolé.
— Réellement, j’eusse aimé satisfaire à votre demande... mais je n’ai point de ces jus.
— Un jus de raisin, alors ?
Je souris d’une oreille à l’autre, rassuré.
— Bingo ! J’ai !
J’allais chercher le nectar pour Georges, et je le servis.
Il s’approcha du verre, et me regarda avec un air condescendant.
— Une paille ?
“Zut, flûte et crotte de bique” me dis-je à moi-même.
— Je n’ai pas de paille... je suis contrit, réellement.
Le bourrin me lança un regard noir, un peu comme Al Capone quand il apprit que c’en était fini de la prohibition.
— Et je fais comment moi ?
J’étais là, devant lui, l’air con.
— Sincèrement désolé.
Le cheval fit demi-tour et s’en alla en maugréant.
— J’te jure ! C’est bien la peine d’avoir envie de soutenir le petit commerce.
J’ai acheté des pailles dès le lendemain.
Épinac, le 16 novembre 2022
mercredi 16 novembre 2022
sponsorisée par le cheval
“Les voyages de Gulliver” est un des romans d’aventure les plus célèbres. Ces aventures se finissent chez ce peuple de chevaux que sont les Houyhnhnms.
Mais si c’était l’inverse... qu’un cheval soit venu d’un pays lointain, pour nous visiter ?
AVOIR OU NE PAS AVOIR
L’autre jour, alors que je prenais mon café sur ma terrasse, en train de lire mon Canard enchaîné, un cheval s’est approché, l’air de rien.
J’ai posé l’hebdomadaire satirique et, je ne sais pourquoi... je lui ai parlé !
— Bonjour cheval, alors ? Tu es perdu ?
Imaginez ma surprise quand celui-ci me répondit :
— Je ne suis pas perdu, humain, et je ne m’appelle pas “Cheval”, mon prénom est “Georges”.
J’ai failli tomber de mon fauteuil. Je l’ai regardé, fixement, comme une poule devant un grille-pain, et j’ai balbutié.
— Co... comm... comment ça donc ? Vous parlez ?
— T’es pas sourd, humain... bien sûr que je parle. Qu’y a-t-il d’étrange à ça ?
— Ben... généralement, évidemment c’est une généralité... (j’avais l’air stupide de vouloir ne pas l’offusquer) les chevaux ne parlent pas.
— Première nouvelle, humain. Mais bon, passons sur l’incongruité du propos, me servirais-tu, puisqu’après tout c’est ici un estaminet... un jus de pomme ?
Là, je me suis pincé.
Non, je ne rêvai pas. Le canasson me commanda un jus de fruit.
J’ai repris mes habitudes de cafetier souriant et serviable.
— Je suis désolé, mais justement, je n’ai plus de jus de pomme pour le moment, il faut que j’aille en acheter.
— Okay, okay, un jus de prunes alors ?
Je me disais de plus en plus que c’était là une carne, et qu’il me faudrait de la patience pour qu’il soit satisfait de mon petit commerce.
— Je suis réellement navré, mais je n’ai pas de jus de prune, Georges.
Le cheval fit une moue désappointée.
— Un jus de banane ? De goyave ? De litchi ?
J’étais de plus en plus désolé.
— Réellement, j’eusse aimé satisfaire à votre demande... mais je n’ai point de ces jus.
— Un jus de raisin, alors ?
Je souris d’une oreille à l’autre, rassuré.
— Bingo ! J’ai !
J’allais chercher le nectar pour Georges, et je le servis.
Il s’approcha du verre, et me regarda avec un air condescendant.
— Une paille ?
“Zut, flûte et crotte de bique” me dis-je à moi-même.
— Je n’ai pas de paille... je suis contrit, réellement.
Le bourrin me lança un regard noir, un peu comme Al Capone quand il apprit que c’en était fini de la prohibition.
— Et je fais comment moi ?
J’étais là, devant lui, l’air con.
— Sincèrement désolé.
Le cheval fit demi-tour et s’en alla en maugréant.
— J’te jure ! C’est bien la peine d’avoir envie de soutenir le petit commerce.
J’ai acheté des pailles dès le lendemain.
Épinac, le 16 novembre 2022
Simone Nataf, psychothérapeute.
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Caroline Nataïeff:
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Yve Bressande.
Tout commence au Printemps
Enveloppante chaleur
souffle pénétrant
embaumant parfum de tilleul y flotter rassuré
doux somnifère
Oublié de prendre ma pilule
contractions blocage
danse d'indien devant le trône
enfin un mince filet
jouissive délivrance
L'Yve
Editions Milagro.
Pabloche et son petit tring tring
et sa grandissime Nouvelle Vague.
Caroline Nataïeff.
Nuées d'Alexandrie: Gérard Battaglia
Véronique et Pabloche: Cap Océan.
Dernière nouvelle de Caroline Nataïeff.
pieds nez doigts gelés
écrire un poème d'yve erre source de chaleur nez dans la neige pieds devant le poêle à bois attendre les rêves Joyeux coups de pelle mousse blanche qui s'envole le dos qui grince Le nez qui goutte fébrile et frissons partout un grog bien brûlant |
Avant le dégel frise la moustache du chat compter les flocons Ce matin givré pelouse étincelante pinson en ballerine État cotonneux jour blanc perspective zéro poème d'yve erre |
Alain Deppe: Avant, après, quelle différence?
Pabloche ( le tube de l'hiver).
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Denis Editions .
Gazette n°73 - vendredi 21 août 2020
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Caroline Nataieff (3):
Yves Bressande:
L'actu alitée* vue par Paul Sabia, juste un microbe.
* Humour évidemment.
De Caroline Nataïeff, la suite de c'est plus comme avant.
La puce au cul !
C’est décidé, je me fais greffer deux puces électroniques !
Une à la vessie et une autre au cul (d’où ce titre !)
De telle sorte qu’à chaque fois que j’irai aux toilettes
En courant ou pas, passant tout prêt du téléphone sans fil
Un signal lui sera envoyé pour qu’il se rappelle à mon souvenir
En sonnant un coup ou deux, pour que je ne l’oubliasse point !
C’est trop bête, à la fin de rater toutes ces occasions de changer
De mutuelle santé ! … Oui, c’est vraiment trop bête ! Absolument !
Sans compter les visites de contrôle gratuit de ma charpente…
Et, après chaque sprint olympique de la dernière chance
D’avoir à relaver mon pantalon, mes mains … et mon couloir !
Vu que c’est toujours au moment où je suis aux gogues
Que l’téléphone sonne !
Le progrès nous facilite la vie, non ?
Pabloche le 19/01/2018 11h 11
Trois chansons. >
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Jour vague.
Gnossienne de l'Astrologue. |